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Darwin Le Chat
4 septembre 2019

Les délires de madame Hayon redessinés par Odette

Suite au piratage des entretiens de Loulou Léonard et comme nous ne comprenions rien à cette idée de transpalette imaginé par madame Hayon, Odette, après avoir clamé que nous étions trop idiots pour comprendre, a décidé de nous aider quand même à comprendre à l'aide d'un dessin et de quelques explications :

 

Vous devez comprendre que selon ce qu'elle a expliqué à Léonard, son transpalette doit être plus large qu'un transpalette ordinaire. Vous voyez bien ce que c'est, y en a tous les jours dans la rue.

Ce qu'est sûr c'est que c'est bruyant et pas toujours très stable.

Mais justement elle a l'air d'avoir voulu faire quelque chose de stable comme un transpalette tout terrain sans pour autant que cela prenne beaucoup de place. Parce qu'un vrai transpalette tout terrain ça stabilise le chargement par l'extérieur de la palette. Et donc c'est assez large. Mais comme elle parle d'un transpalette de 90 cm de large et que les roues doivent être sûrement plus grandes qu'un transpalette, je crois qu'elle ne pourrait pas soulever la palette avec sans envoyer d'abord un élément sous la palette pour la soulever. Vous voyez ? A mon avis ce transpalette a de vraies pneus pour rouler confortablement dans les rues.

Tout cela paraît bien alambiqué !

Pas tant que ça car avec l'hydraulique et un guidage électronique, cela me paraît tout à fait aisé à faire. Le verrouillage et le déverrouillage se feront en appuyant sur un simple bouton.

Ce qui me paraît simple pour toi c'est de faire des dessins en piratant les fichiers de madame Hayon et après de dire que tu as retranscrit sur le papier ce qu'elle dit dans sa discussion ! Pirate !

Con de chat !

 

Transpalette

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1 septembre 2019

Loulou Léonard vs Pinaille

Les entretiens citoyens de Loulou Léonard, député de la 15ème circonscription du Rhône.

Objet : Déplacements urbains et écologie.

Citoyen : Madame Pinaille, citoyenne… un tout petit peu trop

Date : 1er février 2019.

 

– Alors madame Pinaille ! De quoi allons-nous parler ?

– De politesse, de courtoisie, de bienséance. Tout ce qui nous fait défaut !

– Je vois. Mais quel rapport avec les déplacements urbains ?

– Vous ne le voyez pas ?

– Désolé mais non !

– Dans notre pays tout le monde semble totalement irrité par les difficultés de déplacement. Pourtant nous sommes relativement moins nombreux au kilomètre carré que bon nombre de nos voisins européens. En réalité l’irritation provient surtout du fait que nous sommes devenus une nation d’irritables !

– Cela n’a pas toujours été le cas ? Du moins n’avons nous pas toujours été considérés comme des râleurs ?

– Ce n’est pas du tout la même chose ! Le râleur ne garde pas de ressentiment durable ! Au contraire, chez lui il y a une soupape qui permet d’évacuer en permanence la pression. Le râleur ne devient pas méchant au contraire de l’irritable ! Vous voyez la différence ?

– Oui sans doute. Mais alors ? Par quelle évolution malheureuse sommes-nous passés de râleurs à irritables ?

– Mais par l’éducation bien sûr ! La responsabilité en incombe avant tout à l’éducation nationale !

– Ah ? Ce ne serait pas un peu aussi celle des parents ?

– Moins qu’on ne le pense. Vous ne pouvez pas attendre de parents qui ne possèdent pas eux-mêmes les codes de la vie en commun dans une société évoluée qu’ils l’enseignent à leurs enfants.

– Allons bon ! A vous entendre on croirait qu’on vient de subir une invasion barbare !

– Nous en sommes arrivés à ce niveau d’inélégance pour diverses raisons et l’invasion barbare n’est pas la principale d’entre toutes. C’est la pensée libérale qui est la plus à blâmer ! Nous n’avons pas encore cessé de payer le prix de mai 68 !

– Mai 68 a rendu les gens irritables ?

– Mai 68 a rendu les gens égoïstes et impolis. Le moindre défaut de l’égoïste n’étant pas sa propension à ne pas supporter l’égoïsme des autres ! Sans se rendre compte qu’ils agissent exactement de la même manière les égoïstes s’irritent des égoïstes.  

– Je me sens parfaitement libéral et je ne suis ni égoïste ni impoli.

– Je ne parle pas de libéralisme économique !

– Moi non plus ! Je suis libéral au sens qui vous semble répréhensible. Je défends le droit des gens à ne pas vous dire bonjour s’ils ont envie de garder le silence, à ne pas ôter leur couvre-chef quand ils croisent un gradé, enfin vous voyez… ce genre de choses.

– Eh bien je ne vous félicite pas ! La responsabilité de ce foutoir vous incombe donc en partie !

– Non je ne crois pas car je ne défends pas le droit des gens à griller des feux rouges ou klaxonner de manière intempestive. Je suis un légaliste tout comme vous l’êtes sûrement, sauf que je ne soutiendrai jamais une loi qui obligerait les gens à dire bonjour.

– Je n’irais pas jusque-là non plus ! Mais vous êtes d’accord pour dire qu’une fois qu’on a décrété que les voitures devaient rouler à droite, il est normal qu’une personne qui persisterait à rouler à gauche soit considérée hors-la-loi.

– Cela va de soi !

– Mais si on faisait un projet de loi qui obligeait les piétons à marcher à droite, bien entendu vous ne le soutiendriez pas !

– Les piétons à marcher à droite ?

– Oui ! Les voitures roulent à droite, pourquoi les piétons ne marcheraient pas à droite ?

– Mais cela n’a rien à voir ! Les piétons ne se rendent pas dedans en l’absence d’une telle règle !

– Que vous dîtes ! C’est beaucoup plus fréquent que vous ne le croyez !

– Admettons ! Mais dans le lot des piétons morts en marchant, combien sont morts renversés par un véhicule et combien sont morts renversés par un piéton ?

– Je ne prétends pas qu’on en arrive à de telles extrémités mais je prétends que le fait qu’il n’y ait pas de règles d’usage des trottoirs participe grandement à l’irritabilité collective.

– Vous exagérez !

– Non je n’exagère pas ! Mais sans doute n’avez-vous guère besoin de vous déplacer à pied pour en mesurer la difficulté.

– Comme vous y allez ! Je marche sans doute un peu moins depuis 18 mois mais ce n’est que temporaire.

– Dans ce cas vous n’aurez pas manqué de constater que le chaos advint bien avant que l’affluence ne paraisse chaotique par elle-même.

– Je ne me souviens pas avoir été confronté à un empêchement total d’aller à pied. Même là où les trottoirs sont petits, et j’ai bien conscience qu’ils sont souvent trop petits.

– Vous n’êtes pas gênés parce que vous êtes d’un naturel libéral et égoïste. Voilà ce que sont les libéraux, des sans-gêne !

– Expliquez-moi cela !

– Tout est plus simple quand on ne se soucie pas des autres. Tant qu’on n’est pas totalement entourés d’autres sans-gêne on est facilement amené à ne pas se rendre compte de l’entropie que l’on génère par absence de sens collectif. La communauté fonctionne encore grâce aux efforts de ceux qui ont gardé le sens commun.

– J’ignore où vous voulez en venir mais vous pouvez vous vanter d’être la personne qui m’a le plus rapidement égaré en route depuis que j’organise ces rendez-vous. Donnez-moi un exemple concret parce que là c’est du chinois ce que vous me dites !

– Un exemple ? J’en ai un tout prêt ! Par exemple, dites-moi, quand vous marchez sur un trottoir très fréquenté, combien de fois vous arrive-t-il de descendre dans le caniveau pour faciliter le passage des piétons arrivant en face ?

– Dans le caniveau ? Vous voulez dire sur la chaussée ?

– C’est peu ou proue la même chose, vous n’allez tout de même pas vous jeter au milieu de la chaussée si des voitures y roulent ?

– Dans ce cas j’éviterais de descendre du trottoir. Je préfère éviter de me retrouver à l’hôpital plutôt qu’avoir l’air d’un gentleman.

– C’est un risque assez facile à maîtriser et votre réponse prouve que ce n’est pas trop dans vos habitudes.

– Vous en avez de bonnes vous ! Combien de fois je descends du trottoir… Je n’en sais rien au juste, j’imagine que l’on fait ces choses-là de manière inconsciente. A mon sens c’est même à cela qu’on reconnaît une personne bien éduquée, c’est une personne qui se comporte correctement sans avoir à y penser. Je préfère quelqu’un qui, ne m’ayant pas vu dans son dos, omet de me tenir la porte que quelqu’un qui le fait par souci de respecter un code de conduite mais pense en réalité, excusez ma vulgarité : «  Bouge un peu ton cul connard ! »

– Pourquoi penserait-il une chose pareille ?

– Ce qui est valable pour les automobilistes doit l’être assez souvent pour les piétons.

– Je ne vois pas le rapport !

– Moi si.

– Mon exemple vous prouve pourtant qu’on est justement obligé de penser ses actes quand on veut faire preuve d’esprit communautaire. Et penser ses actes suppose un socle éducatif que beaucoup n’ont pas ! Comme le laxisme de trop de parents ne laisse plus espérer l’acquisition précoce d’un socle éducatif commun, c’est à l’école de palier à cette lacune. Mais la mentalité du personnel éducatif n’est guère réjouissante, trop imprégnée des idées de mai 68 ! La volonté d’inculquer un réel code de conduite c’est autre chose que de vagues considérations sur la manière de ne pas passer pour un infréquentable. C’est tout de même étrange qu’à l’heure actuelle il faille attendre que les jeunes gens atteignent leur majorité pour apprendre un code de conduite ! Mais c’est plus par intérêt personnel que par sens du commun qu’on cherche à obtenir un permis d’aller en voiture. On a compris que l’usage d’une automobile nécessitait quelques précautions si on ne voulait pas vivre des drames à répétition. Mais on n’en a jamais déduit que des règles précises pour l’utilisation de l’espace public dans d’autres circonstances pourraient s’avérer fort profitables au bien commun !

– C’est sans doute parce que nul autre que vous ne semble penser que marcher à droite sur les trottoirs puisse améliorer la vie des gens.

– Je ne dis pas qu’il faille marcher à droite sur les trottoirs, je dis seulement qu’enseigner à l’école la manière de se comporter sur un trottoir serait un réel bénéfice pour la société ! Évidemment cela ne peut pas vous sauter aux yeux puisque vous faites partie de ceux qui pensent faire les choses correctement par automatisme ! Mais la réalité c’est que vous bénéficiez sans vous en rendre compte des actes de ceux qui les pensent !

– Je ne sais pas quoi répondre à ça. A vous entendre j’ai l’impression qu’on ne parle simplement pas la même langue.

– Ce n’est pas français ce que je dis ?

– Sans doute, mais  cela ne fait pas sens dans mon cerveau.

– Vous me décevez monsieur le député !

– Désolé.

– Pourtant ce n’est tout de même pas difficile à comprendre. Vous marchez sur un trottoir qui n’est pas très large et sur lequel il est difficile de se croiser à trois. Quel est selon vous le bon code de conduite ?

– Mais je n’en sais fichtre rien ! Tant qu’on ne se rentre pas dedans frontalement, on ne va tout de même pas s’inventer des problèmes !

– Si on ne se rentre pas dedans frontalement c’est d’abord grâce aux personnes qui continuent à penser leurs actes dans ce monde d’égoïstes.

– La preuve que non ! Il arrive immanquablement que deux égoïstes se croisent, et devinez quoi ! Ils n’ont pas d’accident.

– Je le conçois car à la vitesse moyenne de la marche à pied les réflexes humains sont suffisants pour éviter les heurts graves. Je vais même vous dire une chose qui vous surprendra, en général il est souvent plus difficile de se croiser pour deux personnes qui pensent leurs actes que pour deux personnes qui ne les pensent pas. Et vous savez pourquoi ?

– Non ! Bien sûr que non !

– Parce que les personnes qui pensent leurs actes sont devenues si minoritaires qu’elles en sont venues à les penser en fonction de la majorité qui est égoïste. La personne bien éduquée s’attend à croiser principalement des personnes qui ne le sont pas. Donc par exemple quand elle marche sur un trottoir un peu étroit, elle ne peut pas s’attendre à ce que des personnes arrivant en face lui cèdent le passage même quand une règle d’usage mieux répandue lui donnerait la priorité. Pour la facilité de tous, y compris de l’égoïste qui arrive en face, elle aura tendance à toujours descendre du trottoir ou marquer un arrêt en se faisant la plus petite possible pour la laisser passer. Ainsi, quand elle n’a plus affaire à un égoïste mais à une personne comme elle, elle se retrouve comme face à un miroir. Elle descend du trottoir mais la personne en face fait la même chose en même temps. Souvent cela donne lieu à des situations cocasses, c’est comme un pas de deux où chacun se retrouve toujours dans la route de l’autre quand chacun voudrait laisser la priorité à l’autre.

– Trop de politesse tue la politesse ? Cela va peut-être vous surprendre mais ça m’est arrivé assez souvent.

– Moi cela m’arrive presque quotidiennement.

– La preuve que cette société n’est pas aussi individualiste que vous voulez bien le dire !

– Cela m’arrive rarement en croisant des moins de quarante ans figurez-vous ! Toutes ces générations sans éducation. Comprenez que les difficultés des gens bien éduqués tiennent avant tout dans l’absence de règles dont la connaissance serait plus répandue dans la population. Dans bien des domaines de la vie courante les gens bien éduqués ont pour guide de conduite la nécessité de faire attention aux autres. Mais ils manquent eux aussi d’un code plus précis qui leur permettrait de ne plus se sentir isolés dans leurs efforts. Par exemple aucune règle ne disant de quel côté du trottoir il faut marcher, personne n’est en mesure de prétendre qu’il marche dans les règles de l’art. Or ces règles seraient parfaitement aisées à établir et à enseigner dans les écoles.

– Ah bon ?

– Mais bien sûr puisqu’elles tombent sous le sens ! Je vais vous donner des exemples tous simples. Vous êtes sur un trottoir si étroit que deux personnes ne peuvent pas s’y croiser. Imaginez qu’une personne arrive en face de vous. Il faudra nécessairement que vous ou cette personne fasse l’effort de descendre du trottoir. Qui doit être cette personne ?

– Eh bien j’imagine que vous allez me sortir un argument vieille école faisant état d’un droit d’aînesse ou je ne sait quelle considération ayant trait au code d’honneur des gentilshommes. Si vous étiez nazi vous pourriez penser que la personne portant étoile jaune doit céder le passage à celui portant un brassard SS ! Je préfère un peu d’anarchie !

– N’importe quoi ! Non mais vous dites absolument n’importe quoi ! J’espère bien qu’il reste encore une majorité de personnes pour penser qu’un vieillard en déambulateur a le droit de garder le haut du pavé quand bien même ce serait le pape qui arriverait en face !

– Sauf si c’est le pape en déambulateur. Une situation difficile à exclure, hé hé !

– Vous trouvez ça drôle ?

– Hem… Continuez !

– Mettez-vous dans la situation où il s’agit de deux personnes du même sexe et du même âge !

– Le petit maigre s’efface devant le grand costaud ?

– C’est peut-être ce qui finira par se passer si ce pays sombre dans l’incivilité la plus totale ! Comme vous êtes décidé à me faire tourner en bourrique on n’a qu’à imaginer que ces deux personnes ont a peu près la même silhouette ! Eh bien même dans ce cas-là la règle de conduite est tout à fait évidente ! Si elle ne vous saute pas aux yeux c’est que vous êtes aveugle !

– Désolé, je ne vois pas !

– Décidément. Bon ! Pensez sécurité, ça vous aidera.

– Sécurité ? Vous voulez dire que s’il y a un flot de voitures sur la chaussée, les deux personnes restent gentiment sur le trottoir et taillent une bavette ?

– Mais arrêtez de dire n’importe quoi ! C’est sûr que si on fait des trottoirs de 50 cm de large dans des rues très passantes, il faudrait peut-être songer à mettre ces trottoirs en sens unique. Mais la sécurité sur un trottoir doit être pensée comme on pense la sécurité sur une route de campagne. A un piéton sur une telle route on conseille de marcher du côté qui lui permet de faire face aux voitures qui passent à côté de lui. Ainsi, il a une chance de pouvoir se jeter dans le talus s’il a un doute quant à la proximité d’une voiture.

– A mon avis il vaut souvent mieux se jeter dans le talus à chaque fois vu que le danger lié à cette proximité me semble difficilement évaluable !

– Elle l’est parce qu’il y a beaucoup trop de personnes qui ne pigent même pas les choses élémentaires du code de la route ! Souvent un automobiliste pensera qu’il faut mettre son clignotant quand on dépasse un cycliste ou un piéton pour prévenir les véhicules de derrière. Beaucoup ne jugent même pas utile de le faire quand il s’agit de piétons qui n’empiètent pas vraiment sur la chaussée, mais plus encore jugent que c’est totalement inutile de le faire quand eux-mêmes ne sont pas suivis par d’autres automobilistes. Pourquoi prévenir qu’on double alors qu’on est tout seul ?

– Eh oui ! Pourquoi ?

– Mais bon sang ! Mais si vous croisez quelqu’un, ne serait-ce qu’un piéton, c’est bien que vous n’êtes pas seul ! Et c’est aussi pour cela que le piéton doit marcher du côté de la file qui lui fait face, pour voir le clignotant que met l’automobiliste qui lui signifie ainsi « Soyez sans crainte, je vous ai vu ! » Il est évident dès lors que si plein d’automobilistes oublient de mettre leur clignotant, cela perd beaucoup de son sens de marcher face aux voitures, où alors à se jeter effectivement bien souvent dans le talus !

– Vu sous cet angle… Tiens voilà une chose à laquelle je n’avais pas pensé. C’est assez juste ce que vous dites.

– Bien sûr que c’est juste. Mais pour en revenir à nos piétons en ville, on ne peut guère s’attendre à ce que les automobilistes mettent leur clignotant à chaque fois qu’une personne descend du trottoir, dans certaines rues ils auraient leur clignotant en permanence. Mais dans ces rues-là on ne s’attend guère à voir des voitures rouler à fond, il y règne une forme d’anarchie qui est autant imputable au manque de savoir-vivre de bon nombre de nos concitoyens qu’au fait que bien souvent les trottoirs y sont totalement inadaptés. En pratique c’est tout de même moins dangereux que de vouloir marcher le long d’une nationale mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’accidents. Et donc cela tombe sous le sens ! Quand cela est nécessaire la personne qui doit descendre du trottoir est celle qui fait face à la circulation ! Eh bien maintenant que vous savez cela je vous encourage à prêter un peu plus attention à ce qui se passe dans la rue. Les personnes qui pensent leurs actes sont assez faciles à reconnaître. Vous les verrez beaucoup plus souvent qu’à leur tour marcher sur la chaussée. Pourquoi ? Parce qu’elles aiment à rendre les choses plus faciles même à des gens qu’elles ne connaissent pas. Ainsi elles estiment qu’il n’est agréable pour personne de devoir se mettre complètement de travers pour se croiser sur un trottoir trop étroit. Alors elles prennent le parti d’en descendre le plus souvent possible afin de se rendre agréables à la personne arrivant en face qui aura le loisir d’aller droit. Mais c’est alors souvent à la personne qui fait l’effort de descendre de se contorsionner car si elle-même ne fait pas face à la circulation, il faudra bien qu’elle regarde dans son dos pour voir s’il est possible de descendre sans danger du trottoir. Et depuis qu’il y a des véhicules très silencieux c’est même une nécessité absolue !

– Donc vous vous faites partie de ceux qui sont souvent sur la chaussée pour faciliter la vie d’autrui. Cela ne vous ennuie pas de penser qu’en face de vous la plupart des gens ne remarquera jamais cet effort.

– Figurez-vous qu’une fois un couple l’a remarqué et m’a dit merci !

– Une seule fois ?

– Oui ! Mais quand je dis « merci » c’était plutôt « thank you ! » car c’était un couple d’américains ! Y a pas de hasard !

– Soit. Mais par ailleurs, même s’ils ne vous ont pas roulé dessus, de nombreux automobilistes doivent maugréer car ils estiment que les piétons n’ont rien à faire sur la chaussée.

– Oh j’en ai bien conscience mais j’essaye aussi de faire en sorte de ne pas gêner les automobilistes. Donc assez souvent je reste sur le trottoir par force et c’est bien là que je me rends compte du sans-gêne de mes concitoyens. Parce qu’en effet, quand on ne peut pas descendre du trottoir parce que cela irait contre la sécurité, on est bien obligé de se croiser dans des espaces souvent trop étroits ou qui le deviennent parce que des malotrus en occupent une part supérieure à celle qu’ils s’accorderaient s’ils voulaient respecter les règles de bienséance. Non mais je vous jure ! Parfois je me demande si j’ai revêtu une cape d’invisibilité pour qu’on fasse aussi peu de cas de ma présence ! Non mais c’est limite si certains ne vous poussent pas de l’épaule dans le caniveau ! Parfois j’aimerais être une femme gigantesque et large d’épaules. Je m’assurerais de ne pas occuper plus de la moitié du trottoir et je ne ferais pas un effort de plus, histoire de voir combien de personnes viennent se fracasser sur moi. Il y en aurait sûrement beaucoup et presque autant pour s’en plaindre. Et moi je leur dirais : « J’occupe la moitié du trottoir, si vous en faisiez de même vous auriez l’épaule moins douloureuse présentement ! » Les gens sont d’une incorrection, je vous jure !

– Chacun voit midi à sa porte ! Je pense qu’en face de vous il y a souvent des personnes qui ont l’impression qu’elles se sont plus contorsionnées que vous afin qui vous puissiez vous croiser.

– Non je ne crois pas ou alors c’est qu’elles sont de totale mauvaise foi ! Je vous donne un exemple tout simple. Vous êtes sur un trottoir assez large pour deux personnes. Arrivent face à vous deux autres personnes. La moindre des règles de politesse c’est que ces personnes-là, en vous apercevant, arrêtent de marcher côte à côte pour se ranger l’une derrière l’autre afin que vous vous puissiez occuper une moitié du trottoir comme il se doit ! Mais vous croyez qu’il reste combien de français qui comprennent une chose pareille au jour d’aujourd’hui ? Eh bien très peu ! Et alors assez souvent ces personnes qui persistent à rester côte à côte arrivent finalement à votre hauteur et celle qui est la plus proche de vous daigne tout de même faire un effort pour se faire un peu plus petite tandis que vous vous faîtes encore plus petite qu’elle pour ne pas risquer d’être éjectée du trottoir ou scotchée au mur ! Mais c’est à peine si elle ne vous reproche pas d’être dans ses pattes ! Voilà la réalité ! Et voilà pourquoi je marche sur la chaussée aussi souvent que possible ! Pour éviter d’avoir à supporter ces malotrus !

– Je croyais que c’était par esprit citoyen !

– Aussi mais accordez-moi que la citoyenneté devrait être partagée par tous ceux qui aspirent au droit de vote !

– Oui d’accord. Mais de tous temps il y a eu des gens plus ou moins conscients de ce que cela peut signifie de vivre ensemble.

– Mais cette conscience serait bien plus répandue si on enseignait les règles de bonne conduite à l’école.

– Figurez-vous qu’à ce sujet les élèves ont des cours désormais bien plus explicites qu’à mon époque. Moi je n’ai pas été en cours d’enseignement moral et civique.

– Eh bien je me demande ce que ces tarés de ministres qui orientent les programmes et en changent à peu près aussi souvent qu’il y a de rentrées scolaires font rentrer dans ce cours-là ! Autant dire que le résultat ne s’est pas encore manifesté dans l’espace public ! Remarquez qu’avec un peu de chance les enfants finiront par y apprendre quelque chose et pourront enfin apprendre quelques règles élémentaires à leurs parents ! Des règles de sécurité par exemple, comme la manière dont on se balade avec un gamin de trois ans dans la rue !

– Il y a une manière pour cela ?

– Il devrait ! Quand on est en compagnie d’un gosse on le fait marcher du côté du mur, pas du côté de la chaussée ! Mais pour avoir conscience de ces choses basiques encore faut-il penser ses actes ! Je vois tellement de gens inconscients des dangers que je me dis qu’il faudrait un permis pour avoir le droit de faire des enfants.

– Voilà une vieille rengaine particulièrement réactionnaire. Certains parents pensent qu’il faut laisser un peu de liberté aux enfants pour qu’ils grandissent normalement et sans appréhension. Cela ne veut pas dire qu’ils ne les surveillent pas, prêts à réagir si un danger réel se présente.

– Je me demande qu’elle réaction est possible quand le gamin joue les équilibristes sur le bord du trottoir tandis que la maman fait une fixette sur la vitrine d’un magasin de chaussures ? Et bizarrement, plus les gamins sont libres, plus on fabrique des adultes qui, en plus de n’avoir aucun esprit communautaire, sont de vrais empotés !

– Toutes les générations ont leurs lots d’empotés et de personnes brillantes ! Naturellement les critères d’évaluation sont amenés à changer un peu, le monde n’est pas immuable !

– Il ne doit pas changer au point de ne plus se donner de règles à respecter. Aucune civilisation ne peut survivre sans règles !

– Et vous pensez que des règles de conduite concernant la marche sur les trottoirs changeront la face du monde ?

– Il ne s’agit pas seulement de cela ! Il s’agit d’établir des règles qui permettent de rester civilisés dans des lieux où l’on vivra de plus en plus les uns sur les autres ! Il est essentiel que chacun y mette du sien et repense courtoisie, bienséance et politesse comme des nécessités. Il y a plein de choses qu’on devrait s’interdire de faire.

– Comme ?

– Sortir de chez soi ou d’un magasin comme si l’on était prioritaire ! En voiture vous ne passez pas de votre garage à la rue sans vous assurer que la voie est libre ! Eh bien à pied ce devrait-être la même chose ! Quand on arrive à un angle de rue sans visibilité c’est la même chose ! Quand on porte un parapluie et qu’on croise ou double une personne, on doit le lever clairement au-dessus de la tête de cette personne, on ne se dit pas que de lui fourrer un coup dans les cheveux c’est moins grave que de l’éborgner ! Sur un trottoir encombré on ne dépasse pas une personne un peu lente en gênant l’avancée des personnes arrivant en face. A contrario quand on est un peu lent, on ne fait pas comme si les autres ne comptaient pas en restant nonchalamment au beau milieu du trottoir. Idem quand on fait partie d’un petit groupe qui flâne et prend beaucoup de place, on doit rester attentif à laisser passer les gens et toujours penser qu’ils ont aussi le droit d’être un peu pressés. On ne doit pas s’arrêter tout net sans se soucier des gens venant derrière parce que soudainement un article en vitrine s’est imprimé sur notre rétine. On ne doit pas couper la route à une personne que l’on croise de manière perpendiculaire, on passe dans son dos ou si besoin on marque un arrêt et on lui cède le passage…

– Selon le principe de la priorité à droite ?

– Pourquoi pas ? Quand on promène un chien en laisse on ramène son chien près de soi dès que nécessaire, on n’attend pas que la personne arrivant en face ou nous dépassant soit empêchée dans son avancée. Quand on attend à un feu on ne s’avance pas sur la chaussée tant qu’on ne s’est pas assuré qu’il n’y a plus aucun véhicule en approche. Quand on est dans une aire où les piétons peuvent se sentir toujours prioritaires, on ne doit pas s’interdire de laisser parfois la priorité aux voitures. On doit faire preuve d’empathie et se mettre à la place d’un conducteur qui est obligé de traverser la rue de la République un samedi après-midi ! A contrario quand on est en voiture on respecte absolument les limitations de vitesse et on conduit avec souplesse ! Les conduites brutales des crétins m’as-tu-vu et des énervés sont parmi les principaux générateurs de stress et d’animosité. Et quand je parle de souplesse celle-ci va bien au-delà de ce que les conducteurs comprennent généralement. Conduire avec souplesse ce n’est pas qu’une conduite qui donne une sensation de souplesse à ses passagers, c’est avant tout une conduite qui ne laisse pas de doute aux piétons ! Par exemple quand on arrive à proximité d’un passage piéton on anticipe suffisamment pour faire comprendre aux piétons qu’on va vraiment leur céder le passage. Trop souvent les piétons sont dans l’expectative et hésitent à traverser parce qu’un véhicule arrive un peu vite. Et puis le conducteur finit par s’arrêter et se fend d’un geste princier pour signifier qu’il se plie gracieusement à la règle donnant la priorité aux piétons en l’absence de feux tricolores. Mais il aurait été mieux pour tous qu’il soit moins princier et simplement plus citoyen en ne laissant aucun doute sur ses intentions dès le départ !

– Et moi qui ai failli vous prendre pour une royaliste… Mais dites-moi ! Vous en avez beaucoup des règles comme cela ? La vie doit finir par être un peu fatigante si vous vous forcez à penser tous vos actes !     

– Le simple bon sens suffit à en éditer d’autres. On ne se gare en aucun cas sur le trottoir ! On rentre les bacs à ordures de son immeuble si on est le premier à y pénétrer après le passage des éboueurs, même si on estime que c’est le travail de quelqu’un d’autre. On attache son vélo dans des espaces dédiés à cet usage.

– Je suis étonné que vous ne m’ayez pas encore parlé des trottinettes, tout le monde m’en parle !

– Les trottinettes ne sont un problème que parce qu’elles sont majoritairement utilisées par des personnes qui n’ont pas reçu cette éducation propre au vivre ensemble ! Si vous avez reçu cette éducation il est évident qu’en aucun cas vous n’allez poser une trottinette à un endroit où elle est susceptible de gêner le passage ! Et vous vous en servirez comme si elle vous appartenait dans un total respect du code de la route.

– Si vous connaissez ce code.

– Je suis tout à fait favorable à ce qu’un code des déplacements à l’usage des non-automobiliste soit enseigné dans les écoles.

– C’est un peu déjà le cas je crois.

– Je ne parle pas de faire du tricycle avec des panneaux au milieu de la cour de l’école, je parle d’enseigner toutes ces règles que j’ai édictées ainsi que tout ce qui dans le code de la route concerne également les piétons, les cyclistes et les trottinetteurs ?

– Trottinettistes ? Non ?

– Je n’en sais rien au juste.

– Trottineurs ?

– Peu importe, le code est le même !

– Bien. Alors vous pensez que ces quelques règles suffiraient à rendre la ville plus fluide.

– Parfaitement.

– Mais vous n’avez pas la prétention d’en faire une ville plus écologique par ce biais ?

– L’éducation est la clé de tout ! Et comme je vous l’ai déjà dit trop de parents sont complètements laxistes quand il ne sont pas simplement abrutis. Comment voulez-vous qu’un enfant se sente concerné par l’écologie quand ses parents n’ont toujours pas compris, des décennies après sa mise en place, le principe du tri sélectif.

– Sans vouloir passer pour un abruti, moi-même je ne l’ai toujours pas compris.

– C’est pourtant simple ! Le verre vous l’amenez dans les bacs à verre, vous ne le mettez pas dans la poubelle jaune !

– Le verre oui mais quel verre ? Il est spécifié qu’on ne doit pas y mettre les verres dans lesquels ont boit, comme les verres à pied. Pourquoi ?

– Je ne sais pas pourquoi mais je sais qu’il ne faut pas le faire. Donc je ne le fais pas !

– Moi je sais pourquoi mais je testais votre esprit de curiosité.

– Pourquoi aller chercher midi à quatorze heures ? Si c’est marqué qu’il ne faut pas le faire ne le faites pas !

– Je ne suis pas d’accord. Je pense que les enfants ont besoin de comprendre les choses. En apparence un verre à pied ne se différencie guère de celui d’un pot de confiture. Sauf qu’il fond à une température plus élevée que le verre qu’on appelle verre d’emballage, celui des pots et des bouteilles. Donc on ne peut pas les faire fondre ensemble sinon ! Si on n’explique pas pourquoi l’un se met dans la benne de recyclage et pas l’autre, on doit s’attendre à ce que le recyclage ne soit pas fait dans les règles qu’on édite. Tenez ! Je vous donne un exemple ! Vous voyez ce verre en plastique qui me sert de porte-stylo ? A votre avis, si je décide de le jeter un jour, devrai-je le mettre dans la poubelle grise ou dans la poubelle jaune ?

– Faites-moi toucher !

– Tenez !

– Cela me semble être un plastique à mettre dans la poubelle jaune. Je crois qu’il faut surtout éviter de mettre les plastiques trop fins ou trop épais.

– En réalité presque tous les plastiques pourraient trouver nouvel usage par le biais du recyclage, surtout lorsqu’ils ne sont pas imbriqués dans d’autres matériaux comme sur des pièces complexes. A priori ce gobelet est recyclable, sera-t-il recyclé ? Eh bien il faut se fier non pas à son apparence mais au numéro qu’il comporte et indique de quel genre de plastique il s’agit. Ce numéro est indiqué dans un triangle… il doit être en-dessous… attendez…. Non. Il doit être dedans… Ah… Ben voilà un exemple parfaitement mal choisi car ce gobelet n’a aucune indication sinon sur ça provenance fort fort lointaine. Parfois vous pouvez avoir des indications sur la nature du plastique en toutes lettres mais tout ce que je sais c’est que les numéros permettent d’avoir des certitudes sur les possibilités de recyclage.

– Vous venez de dire que tous les plastiques pourraient être recyclés.

– La différence entre pouvoir et être fait toute la différence. Si vous mettez dans la poubelle jaune des plastiques qui, une fois dans l’usine de retraitement seront mis dans une grande benne destinée à l’incinérateur ou une décharge géante, votre geste n’a servi à rien sinon faire rouler inutilement des camions.

– Je le conçois bien donc quand j’ai un doute je m’abstiens.

– Mais ce verre en plastique vous l’auriez mis dans la poubelle jaune.

– Oui, sans doute. Mais s’il n’a pas de numéro cela signifie peut-être qu’il est recyclable.

– Je l’ignore. Tout ce que je sais, ou plus modestement, crois savoir, c’est qu’en France on ne recycle systématiquement que les plastiques portant les numéros 1 et 2. Il paraît que dans d’autres pays d’autres numéros sont recyclés mais en France on se contente de ceux-là car pour les autres le jeu n’en vaut pas la chandelle.

– C’est à dire ?

– Le coût de revient du processus de recyclage est trop élevé. Autrement dit c’est une activité qui ne rapporte pas d’argent. Vous obtiendrez une masse de matière plastique que personne ne vous achètera au prix que vous pourrez proposer, cette matière ou l’équivalent pouvant être produite moins chère directement à partir de dérivés du pétrole.

– Ce n’est pas toujours le cas ?

– J’imagine que non.

– Ah ? Moi je pensais qu’on s’obligeait à recycler en subventionnant le plus souvent la filière de recyclage. D’abord en lui donnant la matière première, la ville récupère le contenu des poubelles jaunes et l’apporte aux entreprises qui recyclent.

– Même les déchets cela s’achète vous savez. C’est même potentiellement un sacré business d’avenir. 

– Mais si ce que vous dites est vrai. Alors pour ce qui concerne les plastiques, toute la filière serait en permanence menacée par la fluctuation des cours du pétrole. Quand le prix du pétrole est haut cela vaut la peine de recycler plus de plastique mais s’il devient très bas, alors plus personne ne veut recycler ? C’est absurde comme raisonnement puisque vous voyez bien qu’on recycle toujours au moins les bouteilles en plastique. Alors imaginez que demain on découvre encore de nouveaux gisements de pétroles gigantesques au point de se dire qu’on ne va jamais en manquer ! Alors son prix dégringole et on ne fait plus aucun effort de recyclage ! On finira par vivre au milieu de montagnes de déchets !

– Mais non ! On jette tout dans le Rhône et vogue la galère, le plastique ça flotte souvent très bien ! J’ironise mais vous avez sans doute raison sur un point. J’ignore encore les tenants et aboutissants de l’industrie du recyclage mais mon assistant doit m’organiser une rencontre bientôt avec un cadre supérieur de la filière. Par contre j’imagine que si on veut s’en tenir à des mécanismes d’économie de marché pour régler les problèmes écologiques, et croyez bien que ce n’est pas la position que je défends…

– Oui, ça j’avais bien compris !

– Eh bien même dans ce cadre-là, je ne connais aucun chef d’entreprise qui rechigne à se gaver de subventions et d’aides en tout genre si on propose de lui en-donner quand bien même il ne cesserait de clamer : « Que le meilleur gagne ! » Donc en effet, on peut massivement subventionner la filière de recyclage afin qu’il devienne plus rentable de recycler les plastiques qui portent les numéros 3, 4, 5, 6, 7… Mais vous savez je ne crois pas que cela puisse suffire à nous sortir d’affaire. Vous avez déjà vu les îles de plastique à la surface des océans ?

– Oui bien entendu… du moins à la télé.

– Il paraît que ce plastique ne représente qu’une infime proportion du plastique que l’on consomme. Une bien plus grosse partie finit dans les décharges ou les incinérateurs. Les fumées qui s’en dégagent ne sont sûrement pas très recommandées pour notre santé mais ceux qui ne finissent pas en fumée auront peut-être des conséquences encore plus graves dans les décennies à venir. Alors pour ma part je suis plutôt partisan de la solution qui est de l’autre côté de la balance.

– Qui est ?

– Estimer autrement ce qu’il en coûte en matière de santé publique d’avoir extrait autant de pétrole de la terre et fabriqué autant de plastique ; puis le taxer à la hauteur des réparations à mettre en œuvre.

– C’est pas des bataillons de gilets jaunes que vous aurez mais des armées !

– Sans doute la politique pour se passer des voitures à essence est une affaire ardue ; mais ne me faites pas croire que les français sont si accrocs à leur bouteille jetable en plastique qu’ils ne la troqueraient pour rien au monde contre des gourdes en métal ou des bouteilles en verre consigné ! Donc on va discriminer ! On va relancer comme beaucoup le demandent la filière du verre consigné pour les particuliers comme elle n’a jamais cessé d’exister pour les débits de boisson. Et on va taxer massivement la vente de produits sous plastique. J’ai déjà travaillé un peu sur ce sujet avec deux ou trois élus.

– Face à l’armée violette je ne vois pas quelle proposition vous êtes en mesure de faire avec une chance qu’elle aboutisse.

– Oh mais j’ai déjà repéré parmi les marcheurs ceux qui sont prêts à marcher de travers, et puis ce n’est pas parce qu’on est minoritaire qu’on doit s’interdire de faire.

– Oui mais vous vous êtes une bande de vioque à vous tout seul !

– Oh ben c’est sympa ça ! Je suis moins près de la retraite que vous figurez-vous !

– C’est à craindre !

– Tout cela pour dire que beaucoup de gens sont encore pleins d’incertitudes quand ils se retrouvent devant une poubelle jaune ! Et cela après des décennies de pratique ! Donc imaginez ce que cela donne quand quelqu’un qui se moque totalement d’écologie arrive avec un déchet en main près de deux poubelles aux couvercles différents.

– Moi je peux vous dire qui est responsable de cela !

– Dites-moi !

– Les antipatriotes qui n’ont cessé d’œuvrer pour la décentralisation ! Cette massive connerie qui fait que chacun décide d’organiser les choses à sa sauce selon les idées médiocres des potentats locaux !

– Vous exagérez ! Rien que notre région est plus peuplée que de nombreux pays en Europe ! On est quand même capable de faire des choses à ce niveau-là sans demander l’aval de hauts-fonctionnaires installés à Paris ! Et la décentralisation s’accompagne de plus en plus d’une centralisation si on s’en tient au niveau des communes qui sont de plus en plus regroupées pour les décisions qui nous intéressent comme la gestion des déchets !

– Quand vous dites « notre région », vous parlez de celle que François Flanby, soudain investi d’une mission divine, a tracé avec sa petite gomme et son petit crayon ? Vous ne pensez tout de même pas qu’une seule bonne idée ait pu germé un jour dans un tel cerveau ?

– Oui ben c’est un autre problème ! Et d’ailleurs faire des régions plus grandes c’est un peu une forme de recentralisation.

– Tout dépend de ce dont on parle ! On est encore assez d’accord pour que les enfants français bénéficient du même programme scolaire dans toute la France, ou sinon autant arrêter de se prendre pour une nation. Si la question des déchets vous semble importante alors vous devriez militer pour que partout en France on applique les mêmes procédures ! Alors on pourrait avoir un cours national sur le tri sélectif qui serait clair, net, précis et pratique et qui n’éluderait pas les questions d’ordre financier que vous avez soulevées !      

– Je ne suis pas contre.

– Si on n’avait cessé de penser les choses à l’échelle de notre pays on pourrait faire bien mieux sur de nombreux sujets relatifs au transport et à l’écologie. Nous avons laissé aux maires le droit de se prendre pour les chantres du développement durable parce qu’ils pensent toujours que leurs décisions sont meilleures que celles du maire d’à-côté ! Ou bien quand manifestement ce n’est pas le cas ils font valoir leur déficit de moyens !

– Ce qui n’est pas forcément faux !

– Eh bien c’est là que l’état serait en mesure d’agir pour rééquilibrer les choses quand la région, elle, pense que ce n’est pas son problème ! Si on avait compté dès le départ sur les régions pour développer nos réseaux de communications et télécommunications la France aurait l’air d’être totalement arriérée dans un paquet d’endroits !

– C’est pas dit !

– Oh si croyez-moi ! Ce n’est ni l’agglomération ni la région qui vont un jour faire en sorte que les déchets finissent là où il doivent finir ! Si un jour j’achète un produit assez toxique dont j’ai un usage ponctuel et sur lequel il est marqué « Pot et contenu à déposer en déchetterie. » Si le pot n’est pas vide, ou croyez-vous que le résidu ira ?

– Eh bien j’imagine que vous le porterez en déchetterie.

– Je le viderai dans le lavabo ! Voilà tout !

– Ah bon ? Eh bien je ne vous félicite pas ! Où est passé votre esprit communautaire ?  

– Je fais pour la communauté ce que la communauté me donne les moyens de faire ! Au lieu de me rappeler sans cesse que je dois me débarrasser de mes encombrants et de mes produits chimiques à la déchetterie la plus proche, soit à quatre kilomètres de chez moi, ouverte à des heures où je travaille alors que je n’ai pas de véhicule pour m’y rendre !

– Vous pouvez louer les services d’un collecteurs de déchets, il y en a plein et cela ne vous ruinera pas.

– Mais oui bien sûr ! Si vous en connaissez un qui travaille après 20h faites-moi signe ! Je ne comprends tout simplement pas pourquoi, alors qu’on parle de reléguer les voitures loin des centre-ville, rien n’est prévu pour donner aux gens les moyens de s’en passer ? Ceux qui n’ont jamais eu de voitures peuvent témoigner à quel point ils ont souvent regretté de ne pas en avoir une.

– On est vendredi et vous n’êtes pas au travail. Donc vous voyez que vous avez bien des occasions de vous occuper de vos déchets polluants !

– Je suis en vacances et pendant mes vacances j’ai d’autres chats à fouetter !

– Alors faites-le le samedi !

– Je vous répète que je n’ai pas de voiture !

– Vous savez qu’il y a une barge faisant office de déchetterie qui est amarrée tous les samedis sur la Saône au niveau de Perrache ? Vous n'êtes pas si loin que ça !

– Je ne le savais pas mais j’attendrai qu’ils l'amarrent sur les quais du Rhône si vous le permettez !

– Soit. En tout cas, à défaut d’avoir un cours clair, net et précis à l’école, on peut toujours faire l’effort de se renseigner sur internet ! Mais pour ma part je pense que le vrai problème des déchets c’est leur production. Si vous faites des travaux ou des réparations, vous avez peut-être ponctuellement besoin d’une peinture résistante au intempéries, d’un dissolvant puissant, d’un tube de joint de salle de bain. Bon, déjà on peut essayer de réfléchir aux alternatives qui offrent un bon compromis entre efficacité et moindre impact écologique. Mais une fois qu’on a fait cela, le plus dur est souvent d’évaluer la quantité nécessaire. La plupart des bricoleurs du dimanche connaît trop bien la valse des aller-retour au magasin, quand on bricole beaucoup on est rarement regardant sur sa consommation d’essence. De toute façon, même si on savait parfaitement évaluer la quantité nécessaire d’un produit, on ne pourrait pas l’acheter en cette quantité-là. En réalité bien souvent on se dit qu’on a besoin de 16 litres, on en achète 20, autant par sécurité que parce qu’il n’existe que des bidons de 5 ou 10 litres, au final on en utilise 14 et les 6 restants finiront par sécher dans le grenier. C’est un luxe anti-écolo que seule une société qui fonctionne comme la nôtre croit pouvoir se permettre. En réalité il y a bien longtemps qu’elle aurait dû comprendre qu’elle ne pouvait pas se le permettre. Sans doute il vaut mieux finir par emmener les 6 litres restants à la déchetterie, mais on voit tellement de choses à la TV qu’on peut à raison douter que cette déchetterie génère au final moins de pollution qu’un rejet sauvage dans le siphon de la baignoire ! La seule bonne méthode serait de pouvoir acheter les quantités dont on a besoin, ou à défaut de pouvoir ramener le surplus. Vous m’accorderez qu’on a peu de chances de voir cela dans un système qui est fait d’un côté d’enfants gâtés et pressés et de l’autre de commerçants encore plus pressés. Les premiers ne veulent pas acheter un pot de peinture qui aurait déjà été entamé par un autre client, les seconds sont des géants du bricolage installés à la périphérie des villes qui ne font pas du neuf avec du vieux. Rien dans tout cela ne nous oriente vers une économie de la sobriété quand bien même la peinture ou le tube de joint que vous achetez serait déclaré « A++++++ » Ce fameux tube de joint au gabarit standard de 400g qu’il faut utiliser avec un pistolet prévu à cet effet. Vous avez fini votre travail mais peut-être que d’ici un an ou deux vous aurez besoin de reprendre un joint, vous ressortirez le tube du grenier dans l’espoir qu’il soit encore utilisable mais rien à faire, la pointe est complètement sèche. Durant cette période des milliers de personnes auront fait la même chose, il y a même sûrement quelques-unes qui habitent près de chez vous. Vous qui n’avez jamais été faire un tour à la maison de le jeunesse et de la culture du quartier parce qu’on dit qu’il n’y a que des vieux, vous qui trouvez les vide-grenier désuets, vous pensez soudainement qu’une maison de quartier où l’on pourrait trouver à louer une perceuse 7 jours sur 7, à déposer gracieusement un tube de colle non terminé qui pourrait servir à un voisin, à acheter à prix dérisoire un boulon donné par un autre voisin, à déposer une machine à laver hors d’usage voire à trouver quelqu’un pour vous aider à la porter, serait une maison de quartier digne d’un certain intérêt pour le bricoleur écolo que vous êtes !

– Vous voulez créer des Emmaüs pour les bricoleurs ?

– Si vous voulez mais ce n’est pas à cela que je pense. Mon bricoleur trouverait sans doute qu’Emmaüs a le côté désuet du vide-grenier. Moi je parle d’un endroit avec des fonctionnaires dans l’air du temps, c’est à dire pas avec les horaires d’ouverture du secrétariat de mairie mais plutôt sur la plage 7h-22h! Un vrai pôle de services mais orienté sur l’écologie. Honnêtement, pour avoir fréquenté pas mal les enseignes qui ont des batteries de photocopieuses prises d’assaut par les étudiants qui préparent leur mémoire, je conçois qu’elles évitent la tentation de s’acheter une photocopieuse. Mais elles évitent déjà beaucoup moins la tentation de s’acheter une imprimante car les imprimantes sont relativement bon marché alors qu’elles ne sont pas négligeables dans le tas hallucinant de déchets électroniques que nous produisons. Typiquement l’imprimante professionnelle d’une maison de quartier devrait remplacer des centaines d’imprimantes nulles qui n’imprimeront jamais plus que quelques milliers de feuilles avant d’être mises au rebut. Et je pourrais multiplier les exemples tant je sais que les foyers possèdent des objets qu’ils n’utilisent que très occasionnellement. Bien sûr il faut une révolution des mentalités et que les gens comprennent qu’ils n’ont pas besoin de posséder autant.

– Le problème avec votre idée c’est que justement vos collègues de l’assemblée pensent que c’est à Kiloutou de louer la perceuse et à Corep de faire les photocopies !

– C’est ouvert le dimanche ?

– Oulala ! Vous avancez sur un terrain glissant là ! Votre aile gauche ne vous pardonnera pas une telle idée parce que peut-être que justement Kiloutou et Corep n’attendent que cette opportunité pour élargir leurs plages d’ouverture.

– Ils ne seront pas forcément plus compétitifs. D’abord ils seront face à un pôle de services à but non lucratif ! Ensuite il va sans dire que cela s’inscrit dans une démarche écologique qui se donne les moyens de lutter contre toute forme de gaspillage, donc encore une fois cela n’est réalisable que dans une société qui a pris conscience de la non résilience du capitalisme libéral, une société qui aura donc retrouvé le goût de la chose commune. Le travail le dimanche n’y serait pas perçu comme un recul des droits des salariés au profit du patronat. Il y a bien des gens qui s’engagent le dimanche, parce qu’ils sont membres de clubs, d’associations, ou même volontaires pour la permanence d’Emmaüs.

– Entre un dimanche travaillé volontairement et un dimanche travaillé sur ordre ce n’est pas vraiment la même chose.

– Il est vrai qu’à l’heure actuelle je ne laisserais pas rentrer le loup dans la bergerie si j’étais salarié du privé. Mais si je m’engageais dans une mission de service public cela serait différent.

–  J’en parlerai à ma fille ! Elle est infirmière au CHU !

– Oui d’accord… Je comprends bien qu’à l’heure actuelle le management du public semble presque pire que dans le privé. Mais ce n’est pas ma politique ! Et puis avant il y en avait qui travaillaient le dimanche au guichet de nombreuses gares, sont-ils si satisfaits que cela d’avoir leur dimanche maintenant que seuls les distributeurs répondent présent le jour du seigneur ?

– Faudrait leur demander !

– Par ailleurs ce n’est pas tant Kiloutou qui aurait du souci à se faire que Quiventou.

– Vous croyez que si les gens se décident à louer plutôt que posséder, c’est déjà un pas en avant ? Pour en revenir aux trottinettes moi je pense que si tous ceux qui en font possédaient la leur au lieu de la louer, ce ne serait pas écologiquement pire et surtout cela poserait moins de soucis ! Ils ne les abandonneraient pas n’importe où !

– Oui d’accord. C’est pour cela que je dis qu’il faut un changement de mentalité. Évidemment je ne décèlerais pas le début d’un tel changement chez un couple de jeunes qui s’installe et décide de ne pas avoir de vaisselle parce qu’il entend se faire livrer tous ses repas par Deliveroo, qui n’a pas de voiture parce qu’il entend faire tous ses très nombreux déplacements en trottinette de location, en Uber, cars Macron ou vol charter, qui n’est pas propriétaire du gigantesque écran plat qu’il a dans son salon parce que le leasing permet d’avoir toujours le dernier cri sans risque. D’abord sa consommation personnelle reste dans ce cas une consommation hyper-énergivore, et de plus elle sert les intérêts d’actionnaires dont la consommation personnelle est en moyenne à minima une injure à la planète.

– Je vais vous dire, votre couple de jeunes, il a sûrement des grands-parents qui ont fait mai 68 ! Ils ont réclamé le chacun pour soi et ils l’ont eu ! Allez donc réparer cela maintenant ! 

Darwin Le Chat
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