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Darwin Le Chat
2 avril 2020

Le Coincoin du coin. Sélection d'articles du 24 mars 2020

24/03/2020

Brève de Coincoin


L'un de nos nombreux pigistes nous rapporte une scène entendue ce matin à sa fenêtre.

Un homme passe avec ses deux enfants d'environ 5 et 7 ans, tout joyeux à l'idée de se rendre au square d'à-côté. Une dame d'un certain âge l'interpelle du haut de son balcon :
- Vous allez continuer longtemps à sortir vos gosses comme ça ? En pleine pandémie !
- Tant que ce sera permis madame ! Et sans mettre en danger qui que ce soit.
- C'est vous qui le dites ! Vous vous rendez compte si tout le monde faisait comme vous ? Faut penser un peu aux autres !
- Visiblement les autres sont nombreux à être déjà morts... ou partis à la mer.
- Et qu'est-ce que ça change ? Une pandémie c'est une pandémie ! On vous demande de rester chez vous, restez chez vous !
- Eh oui mais que voulez-vous madame ? En pleine pandémie du sida, les gens voulaient encore avoir des relations sexuelles.

Brève de Coincoin.

24/03/2020

A Lyon, interpellation d’un confiné qui avait « Tout bien fait. »

Ce matin la police nationale a interpellé un jeune cadre dynamique confiné seul dans son appartement et qui croyait avoir respecté à la lettre la consigne « Restez chez vous ! » En effet il est resté chez lui et n’a pas dépassé son pas de porte depuis mardi midi. Il s’en est d’ailleurs largement vanté sur les réseaux sociaux, fustigeant ça et là ceux qui s’entêtent encore à aller dehors sous n’importe quel prétexte fallacieux. Alors comment cet individu irréprochable est-il devenu la cible des autorités et risque d’être accusé de mise en danger de la vie d’autrui d’après les informations dont nous disposons ?

Il semblerait que la police ait été alertée sur le comportement anormal de l’individu en question par de nombreux livreurs à vélo ou messagers. Ceux-ci ont fini par repérer cette adresse où les uns et les autres se croisaient anormalement souvent dans la cage d’escalier. Vérification faite auprès de toutes les entreprises concernées, depuis mardi l’interpellé aurait commandé pas moins de 27 repas ou en-cas divers, chose qui semble-t-il reste possible malgré l’arrêt de la vente à emporter par de nombreux restaurants ayant simplement baissé le rideau. En outre il se serait fait également livrer plus d’une quarantaine de colis non alimentaires, tous en provenance d’Amazon, ce qui nous laisse dire que notre citoyen modèle, en plus de ne pas être si modèle que ça, est un con.

Allez hop ! A l’isolement !

24/03/2020

Le Coincoin du coin : Des nouvelles de nos chroniqueurs sportifs ainsi que du biathlon et de l’orpaillage.

Vous le savez, le Coincoin du coin est toujours bien au fait de l’actualité sportive. Football, Basket, Athlétisme, Tennis, Sports d’hiver, Baseball, Cyclisme, Rugby, Football américain, Boxe… nombreuses sont les disciplines pour lesquelles nous avons des experts reconnus, quoique tous pigistes. Ces experts se trouvent particulièrement chagrinés de la situation actuelle, nos pages sports ont été réduites au strict nécessaire, c’est à dire à zéro ligne. Par humanité, et parce que lorsque la crise sera finie, nous ne pensons pas trouver beaucoup moins chers qu’eux, nous prenons très régulièrement de leurs nouvelles pour les soutenir moralement. Pour des personnes habituées à regarder plusieurs heures de sport par jour, le sevrage est violent. Nous payons actuellement une psychologue pour leur offrir une oreille salvatrice et ce qui ressort de ces entretiens téléphoniques semble digne d’être rapporté. Ainsi il apparaît que, tout en sachant qu’ils n’y verront aucune retransmission en live, les chroniqueurs sportifs ne peuvent pas s’empêcher de zapper régulièrement sur leurs chaînes préférées. Notre spécialiste de biathlon semble avoir pris un sacré coup sur la casquette et notre psychologue passe beaucoup de temps avec lui. Nous nous attendions pourtant à ce qu’il garde le moral plus longtemps que les autres du fait que les compétitions de biathlon ont résisté plus longtemps au Lock-out. Certes la retraite surprise du champion français Martin Fourcade n’a sûrement pas aidé à maintenir notre pigiste à flots. Ce pigiste qui retourne plusieurs fois par jour sur la chaîne l’Équipe par un réflexe incontrôlable, a accepté que soit relatée l’une de ses déprimes qui s’incarne dans une certaine critique du programme qu’il a trouvé en lieu et place de son programme favori. Voyez comme la vie est cruelle :

« 
Oh non non non ! Je suis fait pour voir la vie en blanc, pourquoi tout est marron ? Pourquoi même la télécommande veut me faire chier ? Je zappe sur la 21, je me retrouve sur la 23 ! C’est quoi cette merde ? Pourquoi on leur fait de la pub à tous ces cons ! Merde ! On est en train de crever ! Et je parle même pas du coronavirus ! On crève de manière intrinsèque ! Comment qu’on va faire quand y aura plus neige ? Du biathlon à roulettes ? Non j’aime pas ! C’est beaucoup moins fun ! Et les farteurs ? Qu’est-ce qu’il deviennent les farteurs ? Y a urgence ouais ! Urgence à remettre le golf stream dans le bon sens ! Et qu’est-ce que je vois sur la 21 ? Je vois la 23 ! Et qu’est-ce que je vois sur la 23 ? De l’aventure en guise de sport ! De l’aventure putain ! « Les gars ! Aujourd’hui on a battu notre record ! 517 grammes ! 517 grammes wooooooooooow ! Et ça, juste en tronçonnant 350 arbres dans la force de l’âge et en retournant 25000 mètres cubes de terre et de roche ! Soyez sympa avec le Caterpillar ! Bientôt la retraite mon vieux ! Quelques jours comme ça et on va s’en payer un deux fois plus gros ! L’an prochain je veux plus voir un brin de verdure dans cette vallée ! Je veux plus voir un poisson de vivant dans cette rivière ! Sinon c’est que vous aurez lambiné comme des tafioles bande de tafioles ! J ’veux qu’on se fixe des objectifs High Level ! A côté de nous les artilleurs de la bataille de Verdun vont passer pour des gamins armés de lance-pommes ! On va tout labourer sur 10 mètres de fond ! Récupérer 10 kilos de cette shit ! Descendre à la ville se payer quelques petites putes ! Et après on se remet au boulot dans la vallée enneigée d’à-côté, même si des danseuses en collants sont en train de tirer des pigeons en rang d’oignons à la carabine à plombs ! » Sérieusement ? Ils veulent ma mort ?
»

Chers canardés, depuis le premier jour nous ne cessons de vous rappeler que l’atterrissage sera très très difficile ! Attendez-vous au pire !

24/03/2020

Le Coincoin du temps qu'il fait !

Excellente nouvelle : l'hiver arrive enfin ! ça pour une nouvelle, c'est une bonne nouvelle ! En plus d'avoir une bonne chance de niquer le processus très en avance qui finit normalement par aboutir à des petites cerises, ou des trucs dans ce genre dont vous espérez vous régaler à votre sortie de confinement, vous allez enfin pouvoir rallumer le chauffage ! Or on vous l'a dit et redit, pas la peine de vous donner plus de 70% de votre salaire brut durant vos congés car vous faites beaucoup d'économies en restant chez vous... sauf en ce qui concerne la facture d'électricité ! Grâce à votre super compteur Blinky qui clignote à chaque Watt, vous avez pu constater que quand vous êtes chez vous, à regarder la TV et l'ordinateur en même temps, à passer l'aspirateur pour ramasser toutes les chips qui tombent de tous les paquets de chips que vous dévorez, à faire de gros gâteaux dans votre gros four, à faire cuire des tonnes de riz même si vous veillez à le cuire à feu doux jusqu'à ce qu'il soit pas cuit... ben tout ça ça rend Blinky épileptique ! Mais c'était encore rien vu que comme il faisait printemps depuis janvier, vous aviez coupé le chauffage ! Ben rallumez-le ! EDF suspend les factures.

Ci-joint une astuce pour trouver la signification de Suspend dans le dictionnaire : tournez les pages jusqu'à "Suspendre"

Merci qui ? Merci Coincoin !

24/03/2020

Le Coincoin, un canard sachant-sachez !

Suite du cours d'informatique pour élève de cours moyen (ou jeunes collégiens peu à l'aise en informatique)

Bonsoir les enfants.

Il est temps de reprendre notre cours d’informatique là où nous l’avions laissé il y a 48h.
Avant-hier nous avons calculé le nombre de lignes contenant des animaux colorés. Nous avons cherché le numéro de la première ligne vide en colonne A et ce numéro était enregistré dans la variable i. Il y a donc i-1 lignes qui contiennent des animaux colorés. Enregistrons ce nombre dans une nouvelle variable que nous appellerons NAnim et qui est aussi un nombre entier.

Dim NAnim as Integer

NAnim = i – 1

Nous allons maintenant balayer ces lignes en nous servant de nouveau de la variable i, pas besoins d’en déclarer une nouvelle puisque celle-ci est libre car le nombre qu’elle contenait a été enregistré dans NAnim.
Par contre nous allons avoir besoin de plusieurs autres variables de format entier pour étudier les caractères à l’intérieur des cellules. Comme il s’agit de caractères on peut se servir de la lettre c. Comme on aura besoin de plusieurs variables de ce type on va les nommer c1, c2, c3…

Dim c1 As integer, c2 As integer, c3 as integer.

Explication : les variables c représentent une position d’un caractère dans une chaîne de caractères. Par exemple VacheBleue est une chaîne de caractère, c’est une chaîne qui possède 10 caractères. La lettre h est située en 4ème position dans cette chaîne. Là nous le voyons sous nos yeux, mais si nous voulons savoir quel est le 4ème caractère de la cellule cells(17383, 1) qui est la cellule de la 17383ème ligne dans la colonne A, on n’a pas besoin d’aller voir cette cellule, on peut utiliser une méthode du langage VBA qui s’appelle « Mid »

Quand on écrit Mid(cells(17383, 1), 4, 1) cela signifie qu’on demande à l’ordinateur d’aller voir dans la cellule cells(17373, 1) ce qu’il y a à partir du 4ème caractère présent dans cette cellule et ce sur une longueur de 1 caractère. Si on avait voulu savoir la même chose mais sur une longueur de 4 caractères, on aurait utilisé Mid(Cells(1783, 1), 4, 4). Par exemple, supposons que la cellule cells(17383, 1) contienne la chaîne suivante :
ChevalVert-ChienVert-CrocodileNoir-RequinBlanc

Si avec notre programme VBA on demande à l’ordinateur Mid(Cells(1783, 1), 4, 4), il ira voir la cellule en question, et ira jusqu’au 4ème caractère. Donc il compte C comme un premier caractère, puis h comme un second, puis e comme un troisième. A partir du 4ème il commence à enregistrer ce qu’il lit et il sait qu’il doit enregistrer les 3 caractères qui suivent ce 4ème caractère. Il retient donc « valV »comme réponse à la méthode Mid(Cells(1783, 1), 4, 4).

Si on lui avait demandé de retenir 100 caractères après le 4ème en marquant dans notre programme Mid(Cells(1783, 1), 4, 100) il aurait enregistré la réponse :
« valVert-ChienVert-CrocodileNoir-RequinBlanc »
En effet la cellule a une chaîne de moins 100 caractères, elle en a 47, mais le programme ne renvoie pas une erreur si on demande de lire plus de caractères qu’il y en a dans la cellule. Donc dans ce cas écrire Mid(Cells(1783, 1), 4, 100) ou Mid(Cells(1783, 1), 4, 47) abouti à enregistrer dans un cas comme dans l’autre :
« valVert-ChienVert-CrocodileNoir-RequinBlanc »
Si on sait par avance combien il y a de caractères dans une cellule, il est néanmoins mieux de dire à l’ordinateur de ne lire que ces caractères-là pour des questions de rapidité d’exécution du programme.

Comme votre instituteur à utilisé plein de noms d’animaux et de couleurs différents et qu’il n’a pas fait des troupeaux qui ont tous la même taille, on ne sait pas combien il y a de caractères présents dans chaque cellule mais on va trouver le moyen d’arrêter de lire les chaînes de caractères quand elles se terminent vraiment.

Nous allons nous servir de la méthode Mid pour extraire les noms d’association Animal-couleur. C’est possible parce que votre instituteur à été quand même assez sympa en insérant un tiret entre chaque association. Donc à chaque fois que nous rencontrons un tiret, nous savons que les caractères qui le précédent forment une chaîne qui constitue une association Animal-couleur. S’il y a un seul tiret dans une cellule c’est qu’il y a deux associations, la première association va du premier caractère jusqu’au caractère précédant le tiret, la seconde association va du caractère suivant le tiret jusqu’au dernier caractère de la cellule. Pour n tirets dans une cellule il y a donc toujours n+1 associations.

Voilà comment se présente la partie du programme qui permet d’extraire ces associations.

Nous allons lire les cellules de la colonne A en commençant à la ligne 1 et en allant jusqu’à la ligne NAnim (souvenez vous que NAnim représente bien un nombre)


1. For i = 1 to NAnim
2. c1 = 1
3. c2 = 1
4. c3 = 1
5. LigneColB = 1
6. Do Until Mid(Cells(i, j), c3, 1) = ""
7. Do Until Mid(Cells(i, j), c2, 1) = "-" Or Mid(Cells(i, j), c2, 1) = ""
8. c2 = c2 + 1
9. Loop
10. Do until Cells(LigneColB, 2) = Mid(Cells(i, j), c1, c2 – c1) or IsEmpty(Cells(LigneColB, 2))
11. LigneColB = LigneColB + 1
12. Loop
13. Cells(LigneColB, 2) = Mid(Cells(i, j), c1, c2 - c1)
14. Cells(LigneColB, 3) = Cells(LigneColB, 3) +1

15. c3 = c2 + 1
16. c1 = c2 + 1
17. c2 = c2 + 1
18. LigneColB = 1
19. Loop
20. Next i

Les lignes 1 et 20 permettent d’indiquer qu’on va répéter le processus pour toutes les cellules de la colonne A qui vont de la ligne 1 à la ligne NAnim (dont on a dit qu’elle était la numéro 20000)
Les lignes 2 à 5 permettent de réinitialiser à chaque ligne les variables qui servent à compter les emplacements de caractères dans la cellule. Pour c1, c2 et c3 on part à chaque fois du premier caractère.

La ligne 6 est en lien avec les lignes 15 à l9 mais plus précisément avec les lignes 15 ET 19
Do Until Mid(Cells(i, j), c3, 1) = "" > on initie une Boucle Do pour la variable c3 que l’on termine avec le Loop de la ligne 19. Pour que cette boucle s’achève un jour il faut incrémenter la valeur de c3 à chaque passage, sinon on va boucler éternellement car la fin du processus dépend d’un certain résultat associé au caractère représenté par c3. En l’occurrence ce que nous cherchons c’est à arriver au point ou le caractère seul de position c3 dans la chaîne renverra un caractère nul. Cela arrivera forcément à un moment puisqu’à chaque boucle on se décale d’un caractère grâce à c3 = c3+1 en ligne 14 et que la chaîne n’est pas infinie même si votre instituteur peut avoir décidé de mettre pleins d’associations Animal-couleur dans la cellule. Soyez sûr que l’ordinateur mettra toujours moins de temps à balayer cette chaîne que l’instituteur mettra de temps à l’écrire même s’il fait des copier-collé. Donc on finira par avoir le dessus. Sauf s’il fait lui aussi de la programmation. Bref. Quand nous aurons trouvé la position de caractère nul, alors nous pourrons en déduire la taille de la chaîne en nombre de caractères. Maintenant passons aux lignes 7. à 9.

7. Do Until Mid(Cells(i, j), c2, 1) = "-" Or Mid(Cells(i, j), c2, 1) = ""
8. c2 = c2 + 1
9. Loop

Il s’agit là aussi d’une boucle Do Loop grâce à laquelle nous allons chercher les tirets qui séparent les associations Animal-couleur. Mid(cells(i, j), c2, 1) renvoie le caractère qui se situe en position c2. Nous avons initié c2 à 1 et avec cette boucle nous l’incrémentons à chaque fois c2 de 1, donc tost les caractères sont balayés jusqu’à ce qu’un tiret soit trouvé ou bien un caractère nul. Simple comme bonjour !

Dans le début de la boucle sur c3 et celle sur c2, vous avez constaté que c1 n’a pas été incrémenté. Donc c1 vaut toujours 1. Avec Mid(Cells(i, j), c1, c2 – c1) nous demandons à l’ordinateur de récupérer tous les caractères qui vont de la position c1 (donc 1 pour le moment) et sur une longueur de c2-c1 caractères. Imaginons une cellule qui commence par ChienVert- . Avec c2 on a cherché la position du tiret. Ce tiret est en 10ème position. C2 vaut donc 10 et c1 vaut 1. Donc c2-c1 vaut 9
L’expression Mid(Cells(i, j), c1, c2 – c1) est donc équivalente à cet instant à Mid(Cells(i, j), 1, 9) ce qui veut dire : ordinateur copie dans ta mémoire la chaîne commençant au premier caractère et d’une longueur de 9 caractères. L’ordinateur voit tout de suite que cette chaîne est « ChienVert » Il la copie dans sa mémoire mais pour que nous puissions la récupérer, il faut encore lui dire où il doit nous la montrer. Nous voulons qu’il nous la montre dans la colonne B de notre feuille et c’est grâce aux lignes 11 à 13 que nous allons y parvenir.

Mais comme il est 23h30 passé et que vous avez encore beaucoup de leçons à apprendre, nous nous retrouverons un autre jour pour la suite de ce cours

Professeur C. Ducoton.

24/03/2020

Préface ou introduction à l’article de fond de D. Lepou

Comme annoncé précédemment, notre analyste politique pages gauches prépare en ce moment un article de fond. En attendant qu’il le finisse et le soumette au comité de relecture des articles de fond, il nous a ce matin fait parvenir des interviews que nous pensons pouvoir publier comme forme d’introduction à son analyse à venir. D. Lepou étant également microtrottoiriste, activité qui occupe d’ordinaire le gros de son temps, il a fait une sortie lors des premiers jours de confinement pour aller poser quelques questions aux rares passants. Pas de micro tendus cette fois-ci, tous nos microtrottoiristes ont reçu l’ordre de garder la distance dès les premières consignes de distanciation sociale, mais D. Lepou connaît suffisamment de monde dans son quartier pour avoir des facilités de contact, même à distance. Comme D. Lepou est du genre peu avare de mots, nous ne publions pas tous les interviews d’un coup.

« 
Vendredi 20 mars 2020, depuis trois jours la ville vie au rythme du confinement. Moi-même je sors pour la première fois, mon attestation dans la poche, même si ma carte de presse devrait suffire. Au Coincoin seuls quelques employés passent encore leurs journées dans nos locaux, on se rend compte que beaucoup de choses ne nécessitent pas la présence de tous au même endroit, c’est un peu ennuyeux d’ailleurs, ceux qui nous possèdent pourraient en tirer des leçons pour une de ces restructurations brutales dont ils ont l’habitude. Dans la rue je retrouve mon métier d’origine, mon métier préféré, microtrottoiriste. Enfin, c’est ce que j’imagine, les choses sont un peu différentes quand on n’a pas de micro, juste un dictaphone, et que le trottoir est désert. J’ignore quoi faire, attendre sur un banc et interpeller le premier passant à distance ? Pourquoi pas ? D’ailleurs il y a des bancs près de chez moi, quais de Saône. J’en choisis un près de la poste, il me permet de voir sortir d’éventuels clients du magasin bio un peu plus au sud. Je n’ai pas longtemps à attendre, moins de trois minutes plus tard une dame en sort, deux gros sacs en mains. Elle a le bon goût de remonter vers moi, je l’observe, une femme d’une quarantaine d’années, plutôt avenante. Elle m’aperçoit aussi et prend immédiatement le parti de serrer à droite bien qu’elle soit encore à bonne distance du banc sur lequel je suis et que le trottoir soit très large. Il va falloir s’y faire, c’est difficile, se fuir comme des pestiférés. Ou bien rester chez soi. Quand la femme arrive à ma hauteur, frottant pratiquement le mur de son cabas et m’observant en oblique d’un œil réprobateur, je sors ma carte de presse et lui dit le plus naturellement possible :
- Excusez-moi madame ? Damien Lepou, journaliste au Coincoin du coin. Je n’ai pas l’air, là, mais je suis au travail. Est-ce que je pourrais vous poser quelques questions ?
La femme s’arrête.
- A quel sujet ?
- Eh bien, à propos de cette situation. Je vois que vous avez fait des courses.
- Oui. Malheureusement les produits frais ne le sont plus et comme il n’y aura sûrement plus de marché sur le quai…
- Ah bon ? Il est supprimé ?
- Je crois bien qu’il va l’être d’après une amie. J’aurais dû en profiter.
- D’ordinaire vous n’allez pas dans ce magasin ?
- Si si. Mais les produits frais c’est plutôt au marché ou dans d’autres magasins bio. Celui-là n’est pas agencé pour cela.
- Oui. Moi aussi ça risque de me manquer un peu.
- Vous habitez dans le quartier ?
- Oui. Juste là ! Vous avez trouvé tout ce que vous vouliez sinon ? Pas de rayon dévalisé ?
- Je n’ai pas trouvé d’œufs. J’ai vu pas mal de sortes de farines manquantes mais pour le reste, le magasin a l’air normal. Il y avait même du riz en vrac.
- Il reste du papier toilette ?
- Figurez-vous que par curiosité j’ai regardé. Effectivement c’était manquant. Mais bon, je pense que les français ont de quoi tenir un siège.
- Vous aussi ?
- Oui.
- En somme la situation est presque ordinaire.
- Ben non ! Là le magasin est vide de clients, il n’y a que le manager et une employée. Mais si par hasard je tombe à un moment où il y a déjà des gens, je ne vois pas trop comment ce genre de magasin peut prémunir ses employés de toute contagion. D’abord ils n’ont pas de masques.
- On n’arrête pas d’entendre dire que c’est inutile si on n’est pas malade !
- Et vous croyez à ces conneries ?
- Pas plus que ça mais…
- Soit cela participe à la barrière qu’on essaye d’établir, soit non ! On ne pas tout dire et son contraire.
- Oui mais on peut concevoir que cela soit une meilleure barrière pour empêcher le virus d’être projeté dans l’air quand on est malade.
- Ça je veux bien l’entendre mais dans ce cas-là, on n’en donne même pas au personnel soignant, seulement aux gens qui entrent à l’hôpital.
- C’est aussi une question de proximité j’imagine. Il est plus facile pour un épicier que pour un infirmier de garder la distance.
- Sûrement mais ce n’est pas plus facile pour un épicier que pour un pharmacien. Enfin, ça dépend plus des locaux que du métier exercé je pense. Or les pharmaciens ont des masques.
- La dernière fois que j’y suis allé, ils n’en avaient pas.
- Cette semaine ils en avaient. Mais je n’en ai pas vu dans les épiceries. Et à la pharmacie, où on ne peut pas acheter de masques, il était écrit que le personnel portait des masques pour assurer la continuité du service médical. Je ne vois pas en quoi les épiciers ne pourraient pas dire qu’ils portent des masques pour assurer la continuité de l’approvisionnement alimentaire. A la longue cela pourrait paraître aussi essentiel. Non je vais vous dire ! Tout ce blabla ça sert à masquer l’incurie du gouvernement. Si on avait des masques pour tous ceux qui travaillent avec des risques de transmission du virus et tout ceux qui sortent faire des courses, le gouvernement décréterait l’interdiction de sortir sans masque.
- Je ne sais pas, j’ai déjà entendu dire que le covid-19 passait assez fréquemment à travers les masques, même les FFP2.
- Oui ben deux masques valent mieux qu’un et mieux que zéro. Vous savez que Roseline Bachelot vient d’être rehaussée à la lumière des événements actuels ?
- Comment cela ?
- Vous ne regardez pas la TV au Coincoin du coin ?
- Si mais pas toutes les chaînes en même temps.
- Tout le monde à raillé Bachelot à cause des vaccins H1N1, et moi la première d’ailleurs. Mais elle a aussi dû se justifier pour avoir stocké 750 millions de masques ! Elle, elle a dit que ce n’était pas au moment où surviendrait la prochaine épidémie qu’il faudrait chercher à avoir des masques. Et la situation d’aujourd’hui lui donne raison.
- Mais ils sont où ces 750 millions de masques du coup ?
- Il paraît que ça se périme !
- Donc il faudrait en refaire régulièrement des millions ?
- Oui.
- C’est pas très écolo.
- Certes mais peut-être que les gens vont finir par comprendre qu’au lieu de s’acheter cinq tee-shirts pas an, il pourraient se contenter de deux et on gardera des ressources textiles pour ce qui peut nous sauver la vie.
- Pas faux. Mais du coup. Comment vous voyez les semaines à venir ?
- Pénibles ! J’ai deux gosses à la maison, pour l’instant ça va. D’ordinaire c’est pas les plus enthousiastes à l’idée d’aller dehors donc cette semaine les a pas trop changés de certaines vacances. Mais si comme tout le monde le pense et comme Macron refuse de le dire à voix haute, on en a jusqu’à mai ou juin, je pense que ça va devenir très très très pénible.
- Vous n’essayez pas de les emmener faire du sport ? Tant que c’est autorisé.
- J’essaye de respecter les consignes. C’est pour ça que je suis aussi chargée, pour éviter de sortir tous les jours.
- Et vous croyez que ça va servir à quelque chose ?
- D’être confinés ?
- Oui.
- Aucune idée. Tout est totalement flou ! Personne ne sait combien de gens sont déjà porteurs du virus puisqu’on ne fait pas assez de tests ! S’il s’est déjà répandu largement et que beaucoup de gens ne développent pas de symptômes, alors il est dans plein de logements, confinés ou pas, tous les gens de ces logements finiront par l’avoir.
- Cela évitera au moins qu’il arrive dans le logement d’à-côté.
- Rien n’est moins sûr puisqu’un type vient peut-être de me le refiler.
- Non mais là vous ne craignez rien ! On est bien au-delà de la distance de sécurité. On pourrait presque rouler à 90 !
- Ah ah ! Je parlais du type de Naturalia ! Lui et moi on aurait très bien pu ne pas se parler mais il a fallu qu’il me demande mon compte client et si je voulais du pain.
- Oui je le connais, c’est un Gimmick chez lui. Il aurait aussi pu vous demander si vous vouliez du riz pas cuit.
- Pourquoi ?
- Un autre Gimmick mais rien à voir avec ce magasin.
- Toujours est-il qu’on vous demande de garder un mètre de distance mais personnellement, de ce que j’ai entendu sur ce virus, je préfère avoir quelqu’un bouche fermée à 50 cm qu’un type qui me parle à 1m50. Si ça passe autant par les postillons !
- Oui enfin… par la respiration en général j’imagine. Sans doute aussi par le nez.
- C’est pas ce que j’ai compris. De toute façon selon moi, si le virus est déjà bien installé, plein de gens dans les magasins l’ont sûrement déjà attrapé. C’est pour ça que je ne comprends pas vraiment pourquoi on ferme les marchés ouverts.
- Parce que les gens sont difficilement canalisables sur les marchés ouverts.
- Il suffit de les canaliser ! Regardez celui de ce quai ! Il est presque deux fois plus long le week-end que la semaine ! Il suffit de prendre l’espace dévolu au marché du week-end et ne faire venir que les marchands qui sont là tous les jours ! Vous changer les emplacements ! Mettez tous les maraîchers au même endroit, les bouchers, poissonniers à un autre… vous balisez, espacez bien chaque stand, faites des files d’attente dans la rue. Et au lieu d’avoir deux rangs face à face ce quai laisse largement la possibilité de les mettre dos à dos. Mais comme on ne veut pas se casser la tête, y a des producteurs qui sont carrément sur la touche alors que le risque n’est pas pire que dans un supermarché ! Vous trouvez ça normal ?
- J’attends déjà de voir si demain le marché est vraiment supprimé.
- J’en suis à peu près certaine. Et sinon ce sera l’un des derniers avant longtemps.
- Nous verrons bien.
- On nous laisse pas le choix de toute façon.

J’ai peu après laissé cette dame vaquer à ses occupations, avant de prendre congé elle m’a dit son prénom mais n’a pas souhaité que je le révèle dans le journal au cas où je relaterais notre discussion.
J’ai décidé de marcher un peu en direction du sud. Passant devant le magasin bio j’ai constaté qu’il était effectivement désert, dans le primeur un peu plus loin j’ai aperçu une cliente. Décidément les affaires ne vont pas fort même pour les commerces jugés essentiels. J’ai du mal à comprendre comment c’est possible. Les gens qui font d’ordinaire leurs courses dans ces petits magasins de centre-ville ont-ils fait tant de réserves que ça en amont ? Pas dans ces mêmes commerces en tout cas puisque nous n’avons pas entendu parler de ruée et de files d’attente comme dans les hypermarchés. J’essaye d’évaluer le nombre de gens qui sont partis se mettre au vert. Ce bataillon-là forme un manque à gagner certain pour les commerces du centre-ville mais si celui-ci semble devenu vraiment paisible, le nombre de véhicules stationnés laisse supposer qu’il reste tout de même du monde. Oui vraiment, l’affluence ridicule dans les commerces d’alimentation m’étonne, nous verront comment la situation évolue. Passant devant le bâtiment des hospices civils je suis interpelé par un joggeur :
- Mr Lepou ! Hé ! Mr Lepou !
Je me tourne vers lui. C’est un homme que j’ai un jour interviewé sur un trottoir et que j’ai depuis recroisé quelques fois, notamment sur le marché. Un bavard ayant le sens du contact mais qui cette fois semble décidé à rester de l’autre côté de la rangée de voitures qui nous sépare.
- Vous voyez ! J’en profite pour courir sur la route ! C’est pas tous les jours !
- Méfiez-vous quand même ! J’ai vu débouler tout à l’heure un type en Porsche bien décidé lui aussi à faire ce qu’il peut difficilement faire en temps ordinaire, du 150 en ville !
- Eh ben dans ce cas-là, la mort sera plus rapide qu’avec le virus.
- Il vous fait peur ?
- Pas plus que ça ! Ce qui me fait peur c’est de devenir un assassin si la situation perdure !
- A ce point-là ?
- Ma femme et moi d’ordinaire on s’engueule toujours. Quand j’étais jeune je faisais jamais de sport moi, je suivais les conseils de Winston Churchill pour bien vieillir. Mais finalement le sport ça permet à la fois de sortir de chez soi et de se calmer les nerfs.
- Y a le divorce qui permet aussi la même chose.
- Oui c’est vrai. Mais financièrement c’est compliqué. Donc je cours.
- Y a beaucoup de gens qui courent en ce moment.
- Difficile de leur en vouloir. Si j’avais des enfants en bas âge je les emmènerais courir moi aussi. Cette situation est tellement… bizarre.
- Je ne vous cache pas qu’elle me met extrêmement mal à l’aise.
- De ne plus pouvoir aller et venir comme vous l’entendez ?
- Parfaitement. Le Coincoin du coin est très libéral à ce sujet, on l’a toujours clamé haut et fort.
- Cas de force majeure !
- Je n’en suis pas si sûr. Si on s’arrête ainsi pour ce type de virus, le jour où il y aura la peste, qu’est-ce qu’on va faire ?
- Ben ça je l’ignore mais je ne sais pas ce qu’on pourrait faire d’autre ? Laisser mourir les gens ?
- Je vais vous choquer en disant qu’il fallait peut-être prendre ce risque-là ! Mais au final je ne suis pas du tout sûr que cela aurait conduit à plus de morts. Certes ils auraient été plus concentrés dans le temps.
- Pas très politiquement correct.
- Je vais écrire un article à ce sujet.
- Ah bon ? Il va paraître quel jour ?
- Je l’ignore encore.
- Vous savez, je ne suis pas abonné… Vous avez vu leur drap ?
Sûr la façade des hospices civils un grand drap portant l’inscription : « Merci »
- Merci de quoi ? C’est pas comme si on avait le choix !
- Je pense qu’ils veulent nous dire merci de bien rester confinés. Donc là on n’est pas censés le prendre pour un compliment.
- Oui enfin bon, si je fais pas mon footing, je le vois pas ce drap ! Et vu qu’on est sur un quai, y aurait pas grand monde pour le voir.
- Alors faut peut-être le lire de manière sarcastique : « Que faites-vous là à lire ce message au lieu de rester chez vous ? » Ou bien c’est destiné aux héros en blouse blanche qui passent par-là !
- Hum… Tout cela me laisse perplexe. En tout cas si je choppe le coronavirus, je serai presque sûr de ne pas l’avoir attrapé durant ce footing. Bon allez ! Je vous laisse Mr. Lepou. J’essayerai de chopper cet article !
- OK ! A bientôt !

Je décidai ensuite d’aller sur la place Bellecour, cela valait le coup d’œil. Je ne pus m’empêcher d’aller en son centre faire une petite vidéo avec mon portable. Inutile de rester là très longtemps, cela paraissant encore plus bizarre d’aller à la rencontre d’un éventuel passant dans un espace aussi grand. Je remontai vers les Cordeliers en prenant la rue Gasparin, traversai en diagonale la place des Jacobins, déserte. Arrivé dans la rue de Brest je fus de nouveau hélé :
- Bonjour Mr. Lepou ! Les trottoirs sont animés à votre goût ?
Je ne remis pas l’homme en question, vraisemblablement lui aussi rencontré lors d’un interview.
- A vrai dire le passant se fait un peu rare pour un journaliste.
- Et ça ne va pas s’arranger ! J’entre à mon tour en confinement ! Franchement, je m’y attendais pas ! Normalement je suis dans un secteur qui tourne encore.
Je n’osai pas lui demander de me rappeler lequel.
- Mais comme on n’a plus de clients.
- Il est vrai que c’est étonnamment calme.
- Normal. Ils ont tous déguerpis comme des lâches !
- Tous peut-être pas. C’est aussi sûrement parce que les gens respectent les consignes.
- Mais bien sûr ! Mardi matin j’ai un collègue, un motard, qui est arrivé furax parce qu’il s’attendait à avoir l’autoroute pour lui tout seul et s’est trouvé pris dans un flux de bagnoles inattendu. M’est d’avis qu’ils partaient pas tous au boulot.
- Ils allaient peut-être dans les hypermarchés !
- Ouep ! Moi je peux vous assurer que mon immeuble est quasiment vide ! Et il y a 28 logements en temps ordinaire ! Pourquoi à votre avis le gouvernement y est allé de manière aussi graduelle ? Pour permettre à son électorat de vivre le confinement de manière à peu près tranquille.
- Hum… Vous savez, ce gouvernement, je lui en mets assez dans les dents en temps ordinaire pour ne pas concéder que parfois il fait ce que n’importe quel autre gouvernement pris de court ferait.
- Sauf un gouvernement qui ne se laisserait pas prendre de court.
- Fatalement. Mais en l’occurrence je ne vois pas trop quelle différence il y a entre les électeurs des partis de gouvernement et les autres si le confinement s’impose à tous.
- Il ne s’impose déjà pas à tous mais à des secteurs d’activité, et en outre au sein de ces secteurs il y a ceux qui télétravaillent et les autres. Vous m’enlèverez pas de la tête que les métiers en télétravail actuellement sont majoritairement le fait des électeurs allant du centre gauche aux républicains compris. Tout comme la probabilité d’avoir une résidence secondaire est supérieure pour chez ces électeurs-là !
- C’est possible mais quand on s’y penche de près, à l’aide de chiffres, on met souvent de l’eau dans son vin.
- Un bon sujet de bouquin pour Thomas Piketty !
- Quoiqu’il en soit vous devriez voir les choses du bon côté. Ce n’est peut-être pas en pensant à ses électeurs que Macron a laissé quelques heures entre son annonce et le début du confinement. Il savait peut-être que des gens fuiraient la ville mais qu’en un sens, cela permettrait de le rendre plus vivable pour tous et donc de s’assurer qu’il serait mieux suivi et qu’il pourrait durer le temps nécessaire sans trop de casse. Vous dites que votre immeuble est presque vide. Le mien aussi me paraît très calme mais j’en suis tout à fait satisfait. C’est tout de même beaucoup mieux que d’avoir la famille d’à-côté qui va monter en tension au fil des semaines. On est dans de vieux immeubles qui n’ont pas tous une insonorisation en rapport au prix qu’on paye au mètre carré.
- Je suis d’accord mais d’un point de vue épidémiologique c’est totalement irresponsable ! On fout la France entière en quarantaine alors qu’on arrive encore très bien à cibler les foyers de contagion. On dit que la France à 9 jours de retard sur l’Italie mais ce n’est pas le cas pour la région Grand-Est tandis que d’autres régions de France auront peut-être 15 jours de retard. Mais on fout tout le pays en confinement en même temps et on laisse à des personnes potentiellement atteintes le droit de parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour échapper partiellement à une mesure qui sinon pourrait les ramener aux conditions de vie ordinaires du prolétariat des banlieues ! Vous voulez que je vous dise ce qu’il fallait faire ?
- Et comment ! Je suis sorti expressément pour avoir des avis de citoyens !
- Il fallait bien en amont bloquer le pays ! Ne plus permettre aux gens d’aller d’une région à l’autre et circonscrire les foyers d’infection tout en laissant les régions non-touchées en activité.
- C’est impossible ! On est un pays fait de régions mais nos régions dépendent trop les unes des autres ?
- On dépend sûrement autant de l’Allemagne que nos régions dépendent les unes des autres. Mais cela ne choquerait personne qu’on ferme temporairement la frontière ! Je ne parle pas du trafic de marchandises !
- Et comment vous faites pour transporter les marchandises ?
- C’est là qu’on verrait si notre monde est devenu si efficient en logistique ! Pas besoin de se remuer trop les méninges ! On coordonne toutes les entreprises de transport en les mettant sous tutelle du ministère ! Et on ne fait rouler que des semi-remorque entre les régions ! Le chauffeur en provenance d’une région dépose sa remorque sur une ère dédiée et s’en retourne d’où il est venu avec une autre remorque.
- Cela me paraît plus facile à dire qu’à faire et en outre ce serait tout de même un peu compliqué de dire aux gens partis de chez eux, parfois loin de leurs enfants : vous ne pouvez plus rentrer chez vous !
- Moi j’ai un peu de mal à comprendre que par humanité envers quelques milliers de personnes on prenne le parti d’en bloquer des millions ! Au pire vous les mettez en quarantaine et ensuite ils rentrent chez eux !
- Je vais vous dire. Moi aussi je suis parfaitement opposé au confinement général et je pense qu’il arrive de toute façon trop tard pour n’être autre que chose qu’un pansement sur une jambe de bois. Mais l’idée de cloisonner le pays au fur et à mesure que progresse le virus, je pense que ça aurait été une usine à gaz pas très efficace au final.
- Moi je crois que si ! Et alors fallait faire quoi à votre avis ?
- Je défends depuis le début la stratégie encore à l’œuvre en Suède ! Si ça se trouve dans 15 jours ils auront changé d’avis mais pour l’heure je n’en démords pas ! Je ne dis pas que cette stratégie est moins dangereuse à court terme, simplement qu’elle le sera sur le long terme. Je n’arrête pas de le dire à qui veut l’entendre ! La casse sociale va être terrible !
- Pour ça on est d’accord ! Mais ce sera pas perdu pour tout le monde !
- Mais oui ! C’est bien ça le problème ! Ceux qui ont les moyens de perdre beaucoup parce qu’ils ont déjà trop ne feront jamais l’effort à hauteur de la contribution qu’ils devraient faire.
- Ah ah ! Rendez-vous compte que même à mon échelle l’inégalité devant le confinement a déjà éclaté au grand jour. Vous savez que je dirige une petite équipe...
-…
- Tous au smic ! Tous partis en confinement dès le premier jour où le chiffre d’affaire a chuté ! Moi on m’a laissé trois jours de plus parce que nos fournisseurs ont expédié de la came à gogo, des livraisons prévues pour mars mais qu’on ne vendra pas. Seulement elles sont livrées, donc on va devoir les payer. Du coup moi je pourrais très bien trouver de quoi m’occuper dans les 15 jours à venir si on me laissait le choix, et sans traîner des pieds ! Mais comme l’état s’engage à ce qu’on reçoive 70 % de notre salaire brut, pourquoi payer des salariés que l’état paye ? Ma boite pourrait payer ! Elle survivra à cette crise puisque les concurrents directs sont pas mieux lotis ! Où alors tout disparaît ! Nous on appartient à une énorme fonds de pension ! Il survivra à cette crise malgré la baisse des cours.
- C’est à craindre.
- Eh ben voilà ! Tous les smicards au chômage direct ! Comme j’étais totalement submergé ces trois derniers jours les mecs des bureaux sont descendus m’aider ! Pourquoi c’est pas eux qui sont partis au chômage en premier alors que mes collègues smicards sont bien meilleurs qu’eux pour le travail à faire ? Parce que la collusion et l’entre-soi sont totalement généralisés même au sein de structures qui vous matraquent le cerveau de l’idée qu’on est tous dans le même bateau et qu’on doit faire preuve d’esprit d’équipe ! Mon cul sur la commode !
- Vous avez l’air très remonté !
- Un peu que je suis remonté ! S’ils croient que je vais retourner frais, guilleret et motivé au taf alors que je viens de laisser un bordel monstre et que dans 6 semaines je n’aurai plus aucun souvenir de la priorité des problèmes à traiter, ils se fourrent le doigt dans le cul jusqu’au coude ! Ah non c’est la démotivation totale !
- Reposez-vous quand même parce que vous allez sans doute devoir faire une croix sur une partie de vos congés !
- Vous croyez ?
- Je l’écris partout depuis trois jours !
- Ah les bâtards ! Va falloir que j’évite la télé quand sonnera l’heure de la reprise et que Macron va faire un appel au sens des responsabilités, au sacrifice pour la nation, au besoin de venir en aide au Medef, sinon je crois que cette fois la bière va vraiment voler à travers la pièce !
- Ce serait dommage. Sauf si vous êtes disposé à vous passer de télé.
- Non j’y arrive pas ça ! C’est con. Je serais sûrement plus calme.

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Darwin Le Chat
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